Sarah Bell, MA, MTA, RCT-C

La méthode Focusing est une sorte de conscience de soi découverte et développée par le psychothérapeute et philosophe Eugene Gendlin. Ses explorations sur le sujet ont débuté dans les années 50, lorsque Gendlin faisait des recherches à l’Université de Chicago en tant qu’étudiant de Carl Rogers. Gendlin et son équipe de chercheurs se sont penchés sur l’efficacité de la thérapie. Ils ont posé des questions telles que : Comment savons-nous qu’une thérapie est efficace ou non ? En quoi cette thérapie fait-elle une différence dans la vie des gens ? Il s’est aperçu que les patients qui réussissaient avaient changé de perception après un processus intérieur. Ce processus a été observé et plus tard développé dans ce qui est maintenant connu sous le nom de focusing, un « sens du ressenti » (Gendlin 1981). Quand votre sens du ressenti change, vous changez, et conséquemment il en va ainsi de votre vie. Un sens du ressenti n’est pas une expérience mentale, mais une expérience physique, une conscience corporelle d’une situation, d’une personne ou d’un événement, une aura intérieure qui englobe tout ce que vous ressentez et savez sur le sujet donné dans un temps donné. Cette connaissance est intégrée dans la méthode Focusing et elle vous communique le tout d’un seul coup plutôt que détail par détail (Gemdlin, 1981, p.37). En plus de ce sens du ressenti, Gendlin décrit un processus en six étapes : libérer un espace, le sens du ressenti, trouver un identifiant, résonner, demander et recevoir.
Dans la période du 18 novembre au 2 décembre 2020, j’ai participé virtuellement à une introduction au cours de focusing, intitulé « La méthode Focusing pour des praticiens transformés », enseigné par Katherine Long, de Focusing, R.-U. Le cours a duré huit heures et comprenait une séance de focusing individuelle avec Katherine. Le cours était de nature expérientielle. Pendant chaque cours, nous passions environ 30 minutes sur le travail de Gendlin, puis nous discutions de ce qui résonnait le mieux avec nous-mêmes, ou sur ce qui survenait, pour nous, pendant la semaine. Le reste du cours était consacré à notre apprentissage expérientiel, où nous pratiquions l’écoute et le focusing en paires. Chaque semaine, Katherine nous présentait de nouveaux concepts, comme faire des pauses, utiliser l’espace ou le silence, répéter gentiment ce que le sujet en focusing avait à dire : « Aimeriez-vous parler d’un thème qui a ressurgi ou y trouver une signification ? » et le sujet en focusing pouvait choisir ce qui était approprié et juste pour elle, dans le moment présent.
Dans notre première séance, Katherine a comparé le sujet en focusing et son monde intérieur à une vague. L’intervenant qui écoute n’entend et ne voit qu’une partie de son expérience. J’ai trouvé la métaphore de la vague très aidante parce qu’elle suggère quelqu’un qui est toujours en mouvement et nous, comme intervenant qui écoute, ne voyons qu’une petite portion de ce qui se passe. Cette idée est un bon rappel pour mon propre travail en thérapie.
En apprenant comment mener une séance de focusing, nous avons appris qu’il y a un intervenant qui écoute et un sujet en focusing. L’intervenant qui écoute invite le sujet en focusing à respirer et à s’installer, puis il l’invite à faire un balayage de son corps. Le sujet en focusing fait l’expérience, puis attend et voit ce qui survient. Selon les préférences du sujet en focusing, l’intervenant qui écoute peut répéter ce que le sujet en focusing dit ou il peut lui donner des réponses minimales. Si rien ne survient, le sujet en focusing peut prendre un certain temps pour respirer profondément. L’intervenant qui écoute et le sujet en focusing se mettent d’accord sur une période de temps consacrée à cette étape, puis l’intervenant qui écoute peut gentiment encourager le sujet en focusing à « revenir » lorsqu’il reste environ une minute à l’expérience. Le sujet en focusing est complètement en contrôle, donc il peut arrêter le processus en tout temps pour prendre du recul. Les valeurs essentielles associées avec la méthode Focusing sont une douce curiosité, un non-jugement et consistent simplement à « être avec » tout ce qui peut survenir et examiner ce que cela nous dit.
Avec les années, la chose qui a résonné avec moi dans ma pratique personnelle et professionnelle grâce au focusing, c’est l’idée d’affirmer qu’« une partie de moi ressent ceci ». Par exemple, si le sujet en focusing dit « je ressens une tension et de l’anxiété dans mon cou », l’intervenant qui écoute peut répéter « une partie de vous ressent de la tension et de l’anxiété dans votre cou ». L’idée de dire « une partie » est de diminuer l’impact du ressenti et de permettre au sujet en focusing d’être avec ses émotions et ses sensations avec compassion. Cette séparation nous aide à nous apprivoiser nous-mêmes ainsi qu’à accepter des émotions que certaines personnes peuvent trouver difficiles comme la colère, la honte et la tristesse. Par le focusing, au lieu de juger l’émotion, vous apprenez à vous poser curieusement une question « une partie de moi ressent de la colère, je me demande ce qu’il y a d’autre… quelle partie de moi ressent cela… ».
Il est aussi important de remarquer que dans le focusing, il est impossible de prévoir ce qui nous arrive, nous ne savons pas toujours ce qui peut survenir. Il est possible que nous ne sachions pas comment le nommer, néanmoins nous pouvons le ressentir. Cela rejoint réellement l’idée d’un être qui possède un sens du ressenti préarticulé, qui reconnaît et qui travaille avec ce sens et qui sait ce qui survient. Lorsque nous ajustons nos lentilles sur ce sens intérieur du ressenti, y a-t-il des mots, des images ou de la musique qui peuvent être utilisés pour le décrire ?
Mon processus avec la méthode Focusing s’est approfondi avec les années, par exemple, des pensées intérieures comme « cela ne fonctionne pas » ont changé en « cela fait une différence, je vous entends pensées négatives, dites-moi ce que vous avez à dire ». Avec les années, lorsque j’ai des séances de focusing, je peux sentir un changement physique dans mon corps. À l’endroit où se loge une tension en début de la séance, je ressens souvent un relâchement physique de mon corps, une légèreté, une liberté, en fin de séance.
En ce qui concerne ma recherche et ma méthodologie, il y a souvent davantage de questions à approfondir qui se présentent au fur et à mesure. Je me pose des questions sur l’impact de la méthode Focusing auprès des personnes atteintes de démences et leurs proches aidants. Parfois, les souvenirs sont imprimés en récit immuable et ils habitent ces personnes. La technique du focusing pourrait leur offrir une perspective fraîche qui pourrait peut-être les amener à avoir un nouveau récit autour de ces souvenirs. Par exemple : Y a-t-il quelque chose de présent, y a-t-il quelque chose que je n’ai pas remarqué ou ressenti auparavant ? Comment pouvons-nous chérir et honorer la personne ainsi que nous souvenir de celle-ci d’une façon ancrée dans le présent au lieu d’avoir nos souvenirs et récits figés autour de ceux-ci ?
En conclusion, comme musicothérapeute, je veux découvrir comment la méthode Focusing, en tant qu’intervention, peut être utilisée avec la musique. Je planifie continuer ma formation pour devenir une praticienne certifiée en focusing. Je suis contente de faire ce parcours, spécialement dans une période où les choses semblent parfois stagnantes ou figées.
Je termine cet article avec ce poème que j’ai écrit qui reflète la manière avec laquelle le focusing m’a aidée à devenir consciente de mon dialogue intérieur. Puissiez-vous être aussi bon et doux envers vous-mêmes.
Doux rappel
soyez avec vous-même comme si vous jouiez du piano, doucement, avec de l’espace et de la curiosité
dites tout haut comment vous jouez, en confiance, de façon sûre et honnête
soyez avec vous-même comme si vous jouiez du piano, avec exubérance, liberté, joie et patience
Pour davantage d’information, visitez www.focusing.org